La psychanalyse ou « la liberté d’être soi »

Le sujet est constitué d’un savoir subjectif des évènements, de connaissances conscientes, reconnues comme telles par « d’autres ». Notre objectivité, notre façon de penser est dépendante de sa partie enfouie. L’inconscient ou affluent nos pulsions, nos émotions qui s’entremêlent, nos refoulements, nos impressions de déjà-vu.

L’inconscient interfère avec la conscience par son mécanisme de contrôle des émotions et des comportements dont nous n’avons aucune connaissance directe et précise. Des mécanismes inconscients interagissent alors avec notre conscience sans que nous puissions toujours en définir le sens.

(« Tant que vous n’aurez pas rendu l’inconscient conscient, il dirigera votre vie et vous appellerez cela le destin » Carl Jung)

Dans la névrose ce sont les significations symboliques, en tant que mécanismes de défense qui peuvent être détraquées ou ne plus être adaptées. Etre conscient de soi c’est savoir qui nous sommes ou le supposer. C’est la capacité de pouvoir se reconnaitre dans ses actions. L’inconscient participe à modeler notre vie, notre façon d’agir et nos désirs par les émotions et les intuitions qu’il nous envoie quand bon lui semble. Travailler avec son inconscient, le rendre en partie conscient, c’est se donner la possibilité de faire émerger nos peurs, nos traumatismes enfouies. C’est mettre à nus nos conflits intérieurs afin d’y mettre NOS PROPRES MOTS.

C’est désirer nous approprier notre existence pour trouver notre chemin, notre place.  L’association d’idées et d’images, nos souvenirs, nos rêves, nous permettent, grâce au  lâcher-prise sur le divan, de nous retrouver avec nous-même.

Un psychanalyste n’est pas un gourou, il ne vous dira jamais ce que vous devez faire ou ne pas faire, il ne répare pas et surtout il ne choisit pas votre chemin à votre place, il vous accompagne dans la relation avec vous-même, en vous permettant « de vous entendre », au-delà du discours formaté du mental.

« Jamais vous ne pourrez marcher avec SES chaussures, il va donc falloir apprendre à marcher avec vos godasses. » (Serge Sommer)

S’accomplir en étant accompagné par la psychanalyse est un des plus beaux cadeaux que nous puissions nous offrir. Mais il est utile de comprendre qu’aucun thérapeute ne peut créer la volonté ou l’engagement, il peut en revanche aider à valider votre décision ou votre « non décision », si ce n’est pas le moment, pour que cette dernière ne soit pas considérée comme un échec.  Respecter la temporalité de chacun est primordial, et revenir plus tard si vous n’êtes pas prêt n’est jamais une défaite.

La « vraie » relation entre le psy et le patient est par définition le développement d’une relation réelle et non transférentielle. Cette dernière représente un énorme intérêt potentiel car cette relation de par son authenticité participe à la « guérison du patient ou « récupération de ses facultés d’agir et de jouir de l’ existence » (S Freud)

« La relation personnelle bienveillante avec le patient, fondée sur la confiance se révèle cruciale dans le processus de changement » (Irvin Yalom). C’est établir un lien qui facilitera l’approche traditionnelle du transfert en trouvant du sens dans la diversité relationnelle (« vraie » relation/transfert) par le savoir-relier pour amener le patient à être conscient de ses responsabilités dans un monde toujours en mouvement.

« Le patient trouve alors une gratification de voir son monde intérieur examiné et le thérapeute est séduit par le défi intellectuel » (Irvin Yalom)

Alors la relation thérapeutique germe en silence, c’est le transfert.

En psychanalyse, on accepte de prendre notre enfant intérieur par la main pour être un adulte en devenir. Comprendre qu’un obstacle sur un chemin n’est pas là pour nous arrêter mais pour nous apprendre à nous relever de notre chute. C’est l’un des enseignements que nous apporte un travail sur nous-même.

Il n’existe aucun diplôme de psychanalyste car il n’existe aucune réglementation, aucune technique unique pouvant nous amener à cette introspection qui ne peut être réduite à une seule pratique. La psychanalyse ne s’apprend pas dans les livres, elle s’expérimente. Il n’y a pas UNE psychanalyse mais DES psychanalyses. Kaiser, Greenwald, Dolto, Klein, Winnicott, Cyrulnik, Irvin Yalom, pour n’en citer que quelques-uns. A chacun son histoire, son approche, sa modernité ou ses valeurs ancrées dans les concepts, et surtout dans son expérience, dans son vécu.

Les connaissances et les concepts sont un socle important avec lesquels il faut savoir évoluer tout en les interrogeant face à l’évolution de la société. La pratique ne doit pas se rigidifier en s’enfermant dans une réglementation d’état ou de pseudo-écoles référentes sous peine de perdre sa véritable identité et sa valeur initiale.

Freud disait être un charlatan mais en 2022, le charlatanisme n’est-il pas plutôt de vouloir légitimer, s’approprier, à n’importe quel prix, la psychanalyse, en souhaitant s’octroyer le seul droit de nommer les analystes en devenir ? Devons-nous accepter d’être adoubé par les névroses de nos pairs ? Qui peut se prévaloir de ce droit ? L’histoire de la psychanalyse témoigne plutôt, à travers toutes les scissions, la volonté de « tuer le père » afin de se légitimer…

La psychanalyse est efficace de par sa liberté, vouloir se l’approprier, l’emprisonner, la malmener dans une guerre de chapelles et d’égos, c’est lui enlever son sens profond et son droit d’exister.

Avoir terminé son analyse sur le divan c’est avoir réussi à se libérer de ses névroses par la disparition de certaines et le contrôle de celles qui peuvent être encore là. C’est avoir accepté d’ouvrir la porte de son enfant intérieur pour l’écouter pour que l’adulte que nous sommes s’autorise à prendre sa place enfin à lui prendre la main en lui disant « tout va bien maintenant, je suis là, allons ensemble parcourir le chemin du devenir car nous avons trouvé le sens de la vie qui nous est propre ». Nous avons alors pris acte de nos souffrances et sommes décidés de nous reconstruire. Nous sommes devenus résilients en dénouant nos traumatismes passés, et en les ayant acceptés et éloignés de toutes souffrances destructrices. A partir de cela nous sommes en capacité de comprendre sans en être trop impacté les futures épreuves de la vie en allant de l’avant sur le chemin du désir. Nous sommes en capacité de les sublimer en les rendant utiles pour les autres. « Grace à la volonté nous nous projetons dans l’avenir et le désir, ce qui constitue alors le début du processus dans la décision et l’engagement » (Rollo May).

Le désir est la reconnaissance que nous voulons donner à notre avenir en accédant profondément à l’intérieur de nous-même pour en définir le sens. C’est prendre conscience que la vie est éphémère et nous donner la possibilité de nous l’approprier pour la remplir du sens profond que nous désirons lui donner. S’autoriser à reprendre en main les rênes de notre propre vie, pour ne plus être un étranger pour soi, ni pour les autres. S’autoriser à une psychanalyse plus ouverte, existentialiste allant dans le sens de l’existence et de la liberté. La caractéristique de l’humain est son expérience personnelle, car « rien n’est réel avant de l’avoir vécu » (Soren Kirkegaard, père de l’existentialisme).

 

 

k

Anne Marie Cristina

Psychanalyste